Musiques, héritages et résonances d'ici et d'ailleurs
31 mai 2024, Faculté de musique de l’Université Laval
Entrée gratuite (inscription obligatoire)
31 mai 2024, Faculté de musique de l’Université Laval
Entrée gratuite (inscription obligatoire)
EN COLLABORATION AVEC
Un lien Zoom sera transmis aux personnes inscrites deux jours avant le colloque, afin que ceux et celles qui ne pourront pas se déplacer à Québec puissent y assister.
La Société québécoise de recherche en musique (SQRM) est heureuse de convier la communauté de la recherche en musique à son colloque annuel 2024. Organisée en collaboration avec la Faculté de musique de l’Université Laval ainsi que le Conseil québécois du patrimoine vivant et la Chaire UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment, cette journée d’échanges scientifiques et de rencontres sera dédiée à la recherche sur les musiques traditionnelles du Québec et d’ailleurs, qu’elles soient anciennes ou contemporaines, en explorant leurs héritages et leurs résonances multiples dans nos sociétés actuelles. Ainsi, ce colloque se propose d’explorer différents axes thématiques pour mieux comprendre la place et l’importance de ces musiques dans nos sociétés contemporaines.
Sandria P. Bouliane, Professeure de musicologie, Faculté de musique de l’Université Laval
Véronique Audet, Coordonnatrice de la Chaire UNESCO TCPPDMEE, UQAC et anthropologue
Méi-Ra St-Laurent, Présidente de la SQRM et musicologue
Aide aux opérations:
Amélie Moïse, Directrice générale de la SQRM
10h00
Accueil et inscription
Salle 1531 – Faculté de musique de l’Université Laval
10h15
Mot de bienvenue
SQRM, Chaire UNESCO, FaMUL, CQPV
10h30 à 11h30
Conférence d’honneur
Nicole Beaudry (anthropologue, ethnomusicologue, professeure retraitée de l’UQAM) : La puissance de la parole. Repenser la représentation écrite de la transmission orale chez les Dènès
Présentée en collaboration avec la Chaire UNESCO
11h30 à 12h00
Sophie Stévance (Université Laval): Résonances transculturelles : héritages et contemporanéités dans l’univers musical de Tanya Tagaq
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12h00 à 13h Pause – dîner |
13h00 à 13h30
Roxane Campeau (Université de Montréal) : Transformations réciproques autour d’un projet d’étude des pratiques vocales eeyouch à Tsisasiipii (Chisasibi, Eeyou Istchee)
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13h30 à 14h00
Marie-Claude Mathieu (Université Laval) : Enjeux et implications de la décolonisation et de l’indigénisation de l’éducation musicale dans les écoles primaires et secondaires
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14h00 à 14h45
Conférence-atelier d’Antoine Gauthier (directeur général du CQPV) : Le travail du Conseil québécois du patrimoine vivant en lien avec la musique traditionnelle
Présentée en collaboration avec le Conseil québécois du patrimoine vivant (CQPV)
14h45 à 15h Pause – Café |
15h00 à 15h30
Marianne Couture-Payer (Université McGill) : Revisiter la tradition : le rythme aksak dans l’opéra Svadba d’Ana Sokolovic
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15h30 à 16h00
Francis Lapointe (Université du Québec à Montréal) : Ben Hokea, un guitariste hawaïen à Montréal
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16h00 à 17h00
Concert commenté de Supay, groupe de musique des Andes, Amérique du Sud. Commenté par Marlène Bordeleau.
Présenté en collaboration avec la Chaire et la FaMUL
17h à 19h Pause – Souper |
19h00 à 20h30
Finale du Concours de conférences de la SQRM
Ouvert au public
20h30 à 21h
Présentation du dernier numéro des Cahiers de la SQRM par la co-rédactrice en chef, Vanessa Blais-Tremblay (Professeure, UQAM)
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21h00 à 22h
Suite du cocktail, remise de prix et réseautage
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Les présentations du colloque se dérouleront entre 10h et 17h.
Programme du colloque – format PDF: cliquez-ici
Conférence d'honneur
Nicole Beaudry (anthropologue, ethnomusicologue, professeure retraitée de l’UQAM)
Présentée en collaboration avec la Chaire UNESCO :
« La puissance de la parole. Repenser la représentation écrite de la transmission orale chez les Dènès »
L’ethnomusicologie québécoise a commencé à prendre forme au début des années 1970. Cette jeune discipline est depuis ses débuts redevable à l’anthropologie, elle-même en constante ébullition. Un outil phare de l’anthropologie exige de « faire du terrain », c’est-à-dire de séjourner là d’où viennent les savoirs que l’on veut acquérir. Raconter quelques moments-clé de mon propre cheminement, depuis 1974, a pour but de rafraîchir notre regard sur les objectifs, approches et outils de travail d’une ethnomusicologue et, surtout, de réfléchir sur les écrits qui en rendent compte. Ainsi, de la simple collecte d’enregistrements de chants et de kattajait (jeux vocaux) d’Inuit de l’Arctique de l’est, jusqu’à l’écriture récente d’un ouvrage qui se veut représentatif du désir et du style de transmission de savoirs traditionnels par des aînés Dènès (des Territoires du Nord-Ouest) aux générations suivantes a induit chez moi un revirement significatif d’attitude et d’approche. En préparation de cet ouvrage (maintenant sous presse), l’urgence du besoin de transmission de leurs traditions dans leur propre langue ressentie par les aînés Dènès a guidé mon travail des dernières années et m’ont amenée à réfléchir plus en profondeur sur l’utilité d’enregistrements audios et, partant, de repenser les notions de participation, de collaboration, de transmission indirecte et de vérité.
NICOLE BEAUDRY
Détentrice d’un Bac ès Arts (1966) et d’un Bac en musique (U. McGill 1972), elle a obtenu une Maîtrise en anthropologie (U. Laval 1977). Son mémoire Les modes de récréation chez les Inuit de l’Arctique central a précédé sa thèse doctorale (U.de Montréal 1986) sur les Danses à tambour des Yupik du sud-ouest de l’Alaska : performance et contexte. Membre du Groupe de recherche en sémiologie musicale de l’U. de Montréal (1974 à 1980), elle a étudié le katajjaq (ou jeu de gorge) des Inuit de l’Arctique de l’Est. Depuis 1988, son regard s’est porté principalement sur les traditions musicales et ludiques des Dènès des Territoires du Nord-Ouest. Professeure au Département de musique à l’UQÀM (1987-2009), elle a poursuivi son travail (2011-2018) chez les Dènès et préparé un livre conçu en collaboration avec trois collègues dènès (sous presse – McGill-Queen’s). Elle s’est également impliquée activement dans la Société Recherches amérindiennes au Québec (maintenant Revue d’études autochtones), d’abord comme membre, autrice, puis comme directrice du comité de rédaction de la revue et présidente de la Société. Plusieurs articles de revue et d’encyclopédie, ainsi qu’un chapitre dans Shadows n the Field (2008) attestent de sa connaissance du travail de terrain, de son intérêt pour les relations humaines et pour les liens entre pratiques musicales, systèmes de croyance et comportements sociaux.
Conférence
Sophie Stévance (Professeure titulaire, Université Laval)
Résonances transculturelles : héritages et contemporanéités dans l’univers musical de Tanya Tagaq
Tanya Tagaq transcende les frontières culturelles, fusionnant les traditions inuites avec la diversité de la scène musicale mondiale. Par son cosmopolitisme esthétique, elle affirme sa place dans la modernité, tissant le patrimoine local et les influences globales en une identité artistique distincte. Son œuvre, naviguant entre improvisation et composition, s’ancre dans le katajjaq, un jeu de gorge inuit, qu’elle réinterprète avec des sonorités et des techniques occidentales.
L’œuvre de Tagaq interroge : en quoi redéfinit-elle les contours de l’expression musicale autochtone dans le contexte contemporain ? Comment fusionne-t-elle le katajjaq avec des influences pour forger une identité musicale qui challenge les conventions et enrichit la scène musicale internationale ? La transcription et la modélisation de sa musique révèlent la complexité de son art, résistant aux classifications traditionnelles. L’examen formel et comparatif de ses performances, que j’ai étudiées sur une période de 15 ans, révèle une approche qui explore les limites entre l’improvisation, enracinée dans le katajjaq, et l’intégration d’éléments stylistiques occidentaux. Ses performances illustrent ainsi l’équilibre délicat entre le katajjaq et des structures musicales élargies, manifestant la dualité de son identité artistique. Elles établissent surtout un lien entre les influences arctiques et la culture occidentale. Bien qu’historiquement ouvert à l’improvisation et à l’innovation, le katajjaq s’est cristallisé autour de motifs spécifiques, que Tagaq réinvente. Ainsi, le katajjaq auquel l’artiste se réfère pourrait être une forme contemporaine de cette tradition.
SOPHIE STÉVANCE
Sophie Stévance dirige l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique à l’Université Laval (OICRM-UL) et le Laboratoire de recherche-création en musique et multimédia (LARCEM). Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en recherche-création, elle se concentre sur les méthodes participatives et a publié de nombreux articles et livres, dont Research-Creation in Music and the Arts: Towards a Collaborative Interdiscipline (Prix IASPM 2018 avec S. Lacasse) et Pour une éthique partagée de la recherche-création (avec S. Lacasse, 2019). Récompensée par deux prix de l’Académie Charles-Cros (2006, 2010) et finaliste pour le Prix Opus (2014, 2015), elle a aussi reçu le Prix d’Excellence de la Fondation SOCAN/MusCan (2023-2024). Outre ses contributions académiques, Stévance travaille dans les domaines de l’opéra et de la réalisation phonographique. Depuis 2018, elle étudie les interactions entre musique et sport à travers son projet Hits for HIIT, qui compte plus de 300000 utilisateurs à travers le monde.
Conférence
Roxane Campeau (Doctorat en ethnomusicologie, Université de Montréal)
Transformations réciproques autour d’un projet d’étude des pratiques vocales eeyouch à Tsisasiipii (Chisasibi, Eeyou Istchee)
La présentation se déroule en trois temps, tout comme ce fut le cas pour les terrains ethnomusicologiques qui en sont le fondement. Les propos qui seront tenus sont en effet issus d’analyses qui découlent des séjours effectués dans la Nation Crie de Chisasibi en Eeyou Istchee (Québec) lors d’un pré-terrain en 2013, d’un terrain principal ayant eu lieu en 2014 et de séjours ponctuels plus ou moins prolongés entre 2015-2022. Tout d’abord, en qui a trait au statut de la recherche, le passage d’un projet imposé à la communauté à un projet sponsorisé par deux institutions locales et intégré à une troisième sera décrit. Par la suite, il sera démontré que ce changement de statut s’accompagne de certaines modifications aux considérations réservées aux pratiques vocales dans un programme qui institutionnalise dans un objectif de revitalisation les rites de passage eeyouch pour l’ensemble de la Nation Crie ainsi que dans le travail de consolidation de l’élaboration de l’exposition permanente du Centre culturel local. Enfin, l’explicitation de ces transformations réciproques ayant eu cours lors du travail collaboratif autour des pratiques vocales eeyouch sera mis en relation avec l’évolution des manifestations et des utilisations publiques passées et actualisées de nikimun à Tsisasiipii (Chisasibi).
Roxane Campeau est en voie de compléter un PhD en musique (ethnomusicologie) à l’Université de Montréal. Elle détient une maîtrise individualisée pluridisciplinaire (M.A) de la même université en plus d’une mineure en sciences cognitives. Sa formation de premier cycle en éducation musicale a été complétée à l’Institut de Rythmique Jaques-Dalcroze de Genève. Après plus d’une dizaine d’années d’enseignement du piano, elle est aujourd’hui fonctionnaire dans le milieu de la santé environnementale au niveau de l’engagement auprès des Autochtones.
Conférence
Marie-Claude Mathieu (Doctorat en éducation musicale, Université Laval)
Enjeux et implications de la décolonisation et de l’indigénisation de l’éducation musicale dans les écoles primaires et secondaires
Les systèmes d’éducation dans des pays comme le Canada et les États-Unis sont des construits du colonialisme et l’éducation musicale incarne les relations de pouvoir dominantes (Hess, 2015 ; Stark, 2023). Ainsi, certaines décisions qui se prennent dans les classes de musique contribuent à perpétuer un modèle d’enseignement eurocentré (Chávez et Skelchy, 2019 ; Hess, 2021). L’utilisation des critères occidentaux comme point de départ pour aborder toutes les musiques à l’école demeure pratique courante et les éléments de culture et les pratiques musicales autochtones sont peu représentées dans les classes de musique (Bradley, 2012 ; Hess, 2015). Par ailleurs, la plupart des éducateurs musicaux ont été formés dans la tradition européenne et n’ont pas les connaissances ni la préparation nécessaire pour enseigner les musiques autochtones (Prest et al., 2021). Cette communication vise donc à explorer différents enjeux et implications en éducation musicale afin de mettre en lumière des pratiques éducatives qui encouragent une compréhension et l’adoption des principes et des visions du monde autochtone.
Marie-Claude Mathieu est doctorante en éducation musicale à l’Université Laval sous la direction de Valerie Peters et s’intéresse aux phénomènes liés à la créativité musicale, à la pédagogie des musiques traditionnelles ainsi qu’à la décolonisation de l’éducation musicale. Après son baccalauréat en éducation musicale (UQAM, 2002) elle a enseigné la musique au secondaire durant une quinzaine d’années. Elle est présentement chargée de cours à l’Université Laval pour la formation initiale des futurs enseignants de musique.
Conférence-atelier
Antoine Gauthier (Directeur général du Conseil québécois du patrimoine vivant, le CQPV)
Le travail du Conseil québécois du patrimoine vivant en lien avec la musique traditionnelle
Le Conseil québécois du patrimoine vivant (CQPV) fédère plusieurs organismes qui œuvrent dans le domaine de la musique traditionnelle. Il réalise lui-même des actions pour le développement de cet écosystème trad: formations professionnelles, cours en ligne TRAD-666, magazine Culture trad Québec, étude socio-économique, programme national des Maîtres de traditions vivantes, plan d’action pour l’accordéon diatonique, et plus. La conférence exposera ces différentes initiatives en ouvrant sur les perspectives futures pour le folklore au Québec.
Antoine Gauthier est directeur général du Conseil québécois du patrimoine vivant (CQPV) depuis 2009. Au sein de cet organisme de regroupement national, il a mené plusieurs projets, consultations, colloques, formations et publications. À titre d’expert en patrimoine culturel immatériel et de spécialiste de la Convention de l’UNESCO de 2003, il est régulièrement amené à donner des conférences et des ateliers en plus d’agir comme facilitateur membre du Réseau global des facilitateurs et de faire partie de l’Organe d’évaluation chargé d’évaluer les demandes d’inscription sur les listes de l’UNESCO. Plusieurs de ses articles sont parus dans des ouvrages nationaux ou internationaux. Le Forum des ONG du PCI a également été co-fondé par ses soins. M. Gauthier détient une maîtrise des Hautes études internationales de l’Université Laval ainsi qu’une maîtrise en philosophie de l’Université de Montréal. Il a précédemment œuvré au sein de l’Organisation des villes du patrimoine mondial, de la Chaire UNESCO en patrimoine culturel de l’Université Laval, du Secrétariat d’organisation du 12e Sommet de la Francophonie (ministère des Affaires étrangères du Canada) et de la Fédération internationale des auberges de jeunesse. À titre de musicien et de chercheur, notamment avec le groupe Les Chauffeurs à pieds, Antoine Gauthier a été plusieurs fois boursier des conseils des arts du Québec et du Canada.
Le CQPV
Le Conseil québécois du patrimoine vivant (CQPV) constitue le regroupement national pour le secteur du patrimoine culturel immatériel et des traditions orales et gestuelles, reconnu et soutenu par le ministère de la Culture et des Communications (MCC) depuis 1993. Il fédère et rassemble des individus et plus d’une centaine d’organismes du domaine des traditions culturelles aux quatre coins du Québec. Son conseil d’administration est formé de spécialistes, de porteurs de tradition, de représentants d’associations et de médiateurs du patrimoine vivant. Le CQPV agit officiellement à titre d’organisation conseil auprès de l’UNESCO dans le cadre de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel.
Conférence
Marianne Couture-Payer (Maitrise en théorie musicale, Université McGill)
Revisiter la tradition : le rythme aksak dans l’opéra Svadba d’Ana Sokolovic
La compositrice montréalaise d’origine serbe, Ana Sokolovic, met ses racines en valeur dans son opéra pour six voix de femmes a cappella paru en 2011, Svadba (mariage), où coexistent des éléments de musique traditionnelle et un langage musical contemporain. L’influence du folklore balkanique est dépeinte à travers la richesse des couleurs et la complexité des rythmes, notamment du rythme aksak, une caractéristique distincte de la musique balkanique.
La première partie de cette présentation définira le rythme aksak en se basant sur la littérature antérieure sur le sujet. J’emprunterai des terminologies et des idées tirées de Béla Bartók, Constantin Brailoïu, Jérôme Cler et Simha Arom, et j’illustrerai les caractéristiques du rythme aksak à l’aide de représentations visuelles inspirées de Godfried Toussaint. De plus, je démontrerai comment le rythme aksak est revisité dans Svadba en utilisant des transformations dérivées de l’analyse de la hauteur des notes, y compris la théorie des ensembles (set class theory) appliquée au contexte du rythme. Selon la « forme première » des rythmes aksaks, des manipulations telles que l’addition, la suppression, le remplacement, la rétrogradation, l’inversion, la permutation ou la rotation peuvent être observées.
La deuxième partie abordera de quelle manière Svadba incorpore le rythme aksak dans certains passages de la scène 1, « Girlfriend sings to Milica », et de la scène 3, « Dance ». Je montrerai comment l’irrégularité de ce rythme peut être observée à la fois dans les tempos lents et rapides tout en conservant ses qualités asymétriques dans différents contextes, bien que leurs effets expressifs aient différents rôles.
Marianne Couture-Payer est étudiante en deuxième année de maîtrise en théorie musicale à l’Université McGill. Elle est lauréate du Conseil de recherches en sciences humaines et du Fonds de recherche du Québec, ce qui lui permet d’entreprendre des recherches sur la musique contemporaine québécoise, travaillant avec des compositeurs montréalais. Dans ses recherches, Marianne s’intéresse au rythme et à la façon dont les éléments de la musique folklorique peuvent coexister avec le langage musical contemporain.
Conférence
Francis Lapointe (Université du Québec à Montréal)
Ben Hokea, un guitariste hawaïen à Montréal
L’émergence de la musique hawaïenne comme phénomène populaire se déploie sur un arrière-plan de crise géopolitique et de colonialisme culturel coercitif. Elle met en perspective la résilience d’un peuple pris dans une dynamique de survivance qui, tout en défiant l’impérialisme qui l’opprime, l’utilise ingénieusement afin de s’en affranchir. Au confluent de multiples influences qui convergent pour former le paradoxe de la « tradition » hawaïenne, c’est une musique qui résiste aux dynamiques de folklorisation par son inventivité.
Son élément le plus distinctif est la guitare, nommée kīkā kila par les autochtones, qu’ils s’approprient en modifiant la façon de produire les sons sur l’instrument. Les orchestres à cordes deviennent alors vecteurs de préservation et de célébration de la culture indigène. Motivés par une crainte légitime d’être traités de la même façon que les autochtones de l’Ouest américain, plusieurs musiciens quittent les iles après l’annexion d’Hawaï aux États-Unis en 1898, pour intégrer des troupes de vaudeville sur le continent. C’est dans ce contexte que Ben Hokea arrive à Montréal au cours des années 1920. Ce guitariste, qui enregistre abondamment pour Victor et Compo à Montréal, se fait également entendre régulièrement à la radio et aura un impact important sur la culture locale.
Faisant appel à la théorie d’articulation indigène de James Clifford, cette communication examinera la présence de Hokea à Montréal, en rendant secondaire la question d’authenticité, afin de considérer la persistance culturelle dans ses rapports politiques lointains, et pour apprécier comment la « tradition » hawaïenne fusionne, encore une fois, avec de nouveaux éléments en terre québécoise.
Francis Lapointe termine présentement une maîtrise en histoire à l’UQAM. Il a consacré son mémoire à l’émergence du commerce musical dans le Montréal préindustriel. Ses travaux s’appuient sur plusieurs années de recherche en musique et sur un baccalauréat multidisciplinaire, combinant histoire, musicologie, muséologie et histoire de l’art. Francis a reçu, en 2022, une bourse de support à la recherche de BAnQ, deux bourses d’excellence aux études supérieures et le Frederick Selch Award de l’American Musical Instrument Society.
Concert commenté
Commenté par Marlène Bordeleau, membre du groupe Supay
Supay, groupe de musique des Andes, Amérique du Sud
Supay est un collectif à configuration variable d’amis originaires de plusieurs pays, unis par leur amour de la musique sud-américaine. Aujourd’hui ce sont Fabian Cabascango (Équateur), Lenin Lopez (Nicaragua), Illary Mamani Bordeleau (Pérou-Québec) et Marlène Bordeleau (Québec) qui vous accompagneront pour cette occasion. Ils vous interpréteront, avec des instruments précolombiens et modernes tels que quenas, sikus, charango, ronroco, bombo et guitare, un répertoire qui retrace les influences autochtones, espagnoles et africaines des musiques sud-américaines contemporaines.
Même si l'entrée au colloque est libre, l'inscription au colloque est obligatoire. De plus, vous avez le choix entre y assister en présentiel ou en ligne.
Si votre choix sera d’assister au colloque en ligne, veuillez noter que vous recevrez le lien de connexion à Zoom la veille de l’événement au plus tard.
Pour toute question, veuillez contacter le comité organisateur par courriel: colloque@sqrm.qc.ca
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